Christine Planté
« Les roses de Saadi » est sans doute le plus célèbre poème de Marceline Desbordes-Valmore. Publié dans son dernier recueil posthume qui a paru en 1860, un an après sa mort, sous le titre de Poésies inédites, il a depuis très souvent été mis en musique, lu, chanté, reproduit dans des anthologies ou dans des livres de classe, appris par cœur…
On a voulu généralement y voir l’expression directe d’une sensualité féminine exacerbée, et un exemple de poésie lyrique dans ce qu’elle aurait de plus caricatural. Une planche du dessinateur Gotlib a contribué à diffuser cette image à la fin du siècle dernier, faisant rire les lecteurs à bon compte – et en dissuadant beaucoup d’aller au-delà.
Mais en dépit de cette célébrité, ou plutôt à cause d’elle, ce court poème qu’on croit si bien connaître est rarement vraiment lu – ou écouté – avec attention. Les lecteurs et lectrices qui veulent bien s’y arrêter découvrent à quel point dans sa brièveté – neuf alexandrins –, son apparente simplicité – lexicale et syntaxique – et son traitement déconcertant des images, le poème échappe, se dérobe. Sa lecture, jamais close, semble toujours à reprendre.
Pour rouvrir cette lecture et sans prétendre en arrêter ni en épuiser le sens1, on proposera ici de l’aborder sous plusieurs angles. Et parce que l’insaisissable commence dès son titre, « Les roses de Saadi », on s’intéressera d’abord, dans un premier volet, au poète persan Saadi, à la façon dont il a été connu et traduit en France, à celle dont Marceline Desbordes-Valmore a pu le découvrir – avant de revenir sur ce qu’elle en a fait.
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