Poème « Aux manes d’Edmond Géraud »

Premier vers dans l’édition de référence ci-dessous : « Comme tout change vite ! Arbres de Belle-Allée,… »
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Manuscrits du poème :

Éditions du poème :

Éditions du poème dans des recueils :

  • « XLVI. Aux mânes d’Edmond Géraud », Marceline Desbordes-Valmore. Les Pleurs. Poésies nouvelles, Paris : Charpentier, 1833
  • « Aux mânes d’Edmond Géraud », Marceline Desbordes-Valmore. Les Pleurs. Poésies nouvelles, Paris : Madame Goullet, 1834

Éditions du poème dans des volumes de l’œuvre poétique de Desbordes-Valmore :

  • « Aux Mânes d’Edmond Géraud », Marceline Desbordes-Valmore. Œuvres poétiques de Marceline Desbordes-Valmore. Reliquiæ. Volume 4, Paris : A. Lemerre, p. 100-102, 1922
  • « Aux mânes d’Edmond Géraud », Marceline Desbordes-Valmore. Poésies complètes de Marceline Desbordes-Valmore publiées par Bertrand Guégan avec des notes et des variantes, tome second, Paris : Éditions du Trianon, p. 303-305, 1932
  • « Aux manes d’Edmond Géraud », Marc Bertrand. Les Œuvres poétiques de Marceline Desbordes-Valmore, tome 1, Grenoble : Presses universitaires de Grenoble, p. 234, 1973





Texte du poème (selon l’édition de Marc Bertrand de 1973) :

AUX MÂNES D’EDMOND GÉRAUD

"Mon fils !" lui répond l’ermite,
"De Notre-Dame-des-Bois
Le pouvoir est sans limite,
Et le ciel s’ouvre à sa voix :
Mais, hélas ! sur cette terre
Où l’homme ne vit qu’un jour,
Il n’est ni croix ni rosaire
Qui guérisse de l’amour !"
    Edmond Géraud.
          L’ERMITE DE SAINTE-AVELLE.

  Comme tout change vite ! Arbres de Belle-Allée,
  Quoi ! vos ombres déjà couvrent un mausolée !
  Une ceinture noire endeuille un jeune enfant ;
  Son âge y veut chanter ; la mort le lui défend.

  Le rossignol ému, l’hirondelle hardie,
  Revenus au printemps sous l’ardoise ou les fleurs,
  Ont demandé peut-être à la frêle Elodie
  Pourquoi son doux visage est tout pâle de pleurs.

  Elle a dit : "Taisez-vous ; laissez dormir mon père.
    Il ne chante plus avec nous.
  Ne couvrez point ma voix ; car tout ce que j’espère,
  C’est qu’il la reconnaît quand je prie à genoux.

  "Mais ne vous sauvez pas : c’est encor sa demeure ;
  Il aimait à nourrir vos nids et vos chansons ;
  Ma mère sait par cœur ses pieuses leçons,
  Et Dieu ne veut pas qu’elle meure !

  "Taisez-vous ; elle est veuve, et tout la fait pleurer.
  Ne lui rappelez pas votre chant le plus tendre ;
  Une lyre est brisée ; elle croirait l’entendre ;
  Laissez-lui du silence et le temps d’espérer !

  "Écoutez : car l’enfant du Barde et du poète
  Sait épeler la vie en mots harmonieux,
  Et mon père a versé sur ma bouche muette
  Des paroles d’amour qu’il allait prendre aux cieux.

  "Et je les retiendrai : Je veux avec ma mère
  Parler comme il parlait aux pèlerins troublés ;
  Je sais comme il rendait leur route moins amère,
  Quand ils s’éloignaient consolés !

  "C’est lui qui me portait, pour enhardir mon âge,
  Où germent les oiseaux dans leurs œufs renfermés,
  Quand je plongeais mon cœur dans votre frais ménage,
  Pour compter des petits, comme moi tant aimés !

  "Regarde ! disait-il ; oh ! regarde, ma fille !
  C’est ainsi que ta mère a couvé notre enfant ;
  L’âme du rossignol s’use pour sa famille !...
  Et puis, il me berçait sur son cœur triomphant.

  "Puis, un soir dans ses yeux tremblait une lumière,
  Pareille à cette étoile. - Hélas ! je l’aime bien ! -
  -Et de sa bouche encor sortit une prière
  Mélodieuse... et puis je n’entendis plus rien.

  "Le lendemain, ma mère était seule et couchée ;
  Une parure affreuse enveloppait ses pleurs ;
  Et sous la noire étreinte à mon corps attachée,
  Moi ! je passe un printemps sans baisers et sans fleurs !"

  Mais l’enfant n’a pas dit, barde de SAINTE-AVELLE,
  Ton cortège de gloire au dernier de tes jours ;
  Et nos bouquets lointains vers une ombre nouvelle,
  Qui s’en retourne jeune où l’on aime toujours !

  Oui ! le dernier adieu d’une lyre expirée
  Sonne le rendez-vous pour un autre avenir ;
  Il tinte une prière ! une plainte sacrée,
  Qui roule avec tristesse au fond du souvenir !

  Edmond Géraud est mort, il y a environ deux ans, dans un âge peu avancé, à sa maison de Belle-Allée, près Bordeaux. Il venait de mettre la dernière main à une nouvelle édition de ses poésies, considérablement aug­mentée. Nous avons l’espérance que ce nouveau recueil sera bientôt livré à l’impression.
Note de l’Éditeur des Pleurs.





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