« La Goutte d’Eau », Marceline Desbordes-Valmore. Élégies et poésies nouvelles, Paris : Ladvocat, p. 211-214, 1825
Édition du poème dans des volumes de l’œuvre poétique de Desbordes-Valmore :
« La goutte d’eau », Marc Bertrand. Les Œuvres poétiques de Marceline Desbordes-Valmore, tome 2, Grenoble : Presses universitaires de Grenoble, p. 599, 1973
Édition du poème dans des anthologies de poèmes de Desbordes-Valmore :
« La Goutte d’eau », Marceline Desbordes-Valmore. Poèmes, Paris : Tchou, p. 70-72, 1965
Texte du poème (selon l’édition de Marc Bertrand de 1973) :
LA GOUTTE D’EAU
Il était dans le monde une goutte d’eau pure,
Trésor secret de la nature,
Cachée en un sable brillant,
Sous un ciel toujours calme et toujours bienveillant.
Sur la rive silencieuse,
Une pauvre exilée était venue un jour ;
Là, sa douleur mystérieuse
Expia lentement le crime de l’amour ;
Car l’amour est souvent un crime sur la terre :
Dieu seul sait la clémence, il le faut implorer.
Chez les hommes, tout prêt peut-être à s’égarer,
Dieu seul eut un pardon pour la femme adultère.
L’autre femme avait fui. Nul n’entendit sa voix :
On dit qu’elle était morne, inquiète, honteuse,
Et que l’avide écho, l’immortelle écouteuse,
Ne put la traliir une fois.
Que son secret dorme comme elle ;
Coupable elle a passé, ses juges ne sont plus ;
Et peut-être celui qui la fit criminelle,
En garda-t-il à peine un souvenir confus.
Son voile emporté par l’orage,
Apprit à l’autre rive ou sa fuite, ou sa mort :
Personne n’accueillit ce témoin du remord ;
Pour plaindre le malheur il faut tant de courage !
Son cœur las de l’exil dont il allait sortir,
Offrant au ciel sa crainte et ses tendres misères,
Fit tomber de ses yeux sincères
Une larme de repentir :
C’était la goutte d’eau, reçue à sa naissance
Par l’ange qui préside aux dernières douleurs,
Et couronne des mêmes fleurs
Le repentir et l’innocence.
D’un éclat inconnu cette eau brilla longtemps.
Gardée au sein des fleurs, teinte de leurs parures,
Elle allait être perle ; encor quelques instants,
Une larme effaçait les perles les plus pures.
Pourquoi dans les déserts l’homme va-t-il errer ?
Pourquoi son avide imprudence,
Aux secrets de la Providence,
Brûle-t-elle de pénétrer ?
Un homme... le hasard devait-il l’y conduire ?
Errant sur le rivage un homme va détruire
L’espoir du temps, l’amour des cieux,
Et de l’ange des pleurs le dépôt précieux.
Le voyageur, au sein d’un lotos qui s’entr’ouvre,
Contemple en palpitant ce trésor qu’il découvre ;
Ses mains ont dispersé les voiles superflus :
L’ange effrayé s’envole, et la perle n’est plus.
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