Poème « Louise de La Vallière quittant sa mère »

Premier vers dans l’édition de référence ci-dessous : « Votre dernier bonsoir, ma mère !… »
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Éditions du poème :

Édition du poème dans des recueils :

  • « Louise de La Vallière », Marceline Desbordes-Valmore. Bouquets et prières, Paris : Dumont, p. 205-209, 1843

Édition du poème dans des volumes de l’œuvre poétique de Desbordes-Valmore :

  • « Louise de La Vallière quittant sa mère », Marc Bertrand. Les Œuvres poétiques de Marceline Desbordes-Valmore, tome 2, Grenoble : Presses universitaires de Grenoble, p. 486, 1973





Texte du poème (selon l’édition de Marc Bertrand de 1973) :


LOUISE DE LA VALLIÈRE

Quittant sa Mère

Fragment de Bulwer

      Louise

  Votre dernier bonsoir, ma mère !

      Sa Mère

          Tu chancelles,

  Et je vois sous ton front les pleurs que tu me cèles.
  Pourtant le monde s’ouvre indulgent devant toi,
  Ma fille ! Une humble reine, unie au plus grand roi,
  T’appelle dans sa cour où, disent les poètes,
  La gloire a surpassé, par ses pompeuses fêtes,
  Tout ce que l’Orient dit à l’histoire.

      Louise

            Hélas !

      Sa Mère

  Une cour !... une cour !...

      Louise

        Où vous ne serez pas,
  Ma mère ! Ni ces murs où j’entendais vos pas ;
  Ces murs, vieux raconteurs de mes jeunes années,
  Qui recouvraient en paix deux humbles destinées.
  Ni les champs, ni les bois, où je voyais le jour
  Descendre et se lever, doux comme votre amour.
  Écoutez, c’est l’Ave Maria... que je l’aime !
  Oh ! puissé-je partout redescendre en moi-même,
  À cette heure du ciel, et retrouver mon cœur
  Aussi plein de ma mère et de mon Créateur !
  L’Eden d’un pauvre enfant, c’est le berceau.

      Sa Mère

            Louise !
  L’Eden, c’est la vertu ; c’est ton âme, promise
  Au désert de mes ans. En traversant les cours,
  Dieu sur ton aile blanche étendra son secours.
  Enfant ! si le respect tient lieu d’expérience,
  Ta mère, n’est-ce pas, sera ta conscience ?

      Louise

  Oui, je vous dirai tout, et vous me répondrez
  Chaque soir une ligne, où vous me bénirez ;
  Et vous irez pour moi dans ces pauvres chaumières,
  D’où nous voyons là-bas scintiller les lumières :
  De l’hiver qui s’approche il faut les consoler,
  Et nourrir mes oiseaux, trop faibles pour voler.

      Sa Mère

  Tu ne me parles pas d’un jeune aigle, ma fille,
  Dés le berceau promis pour chef à ma famille.
  Si j’apprends qu’à la guerre il ne pense qu’à toi,
  Ne t’en dirai-je rien ?

      Louise

        Il aime tant le roi !

      Sa Mère

  Et nous sommes déjà si fières de sa gloire,
  Que ses droits sont écrits dans ta jeune mémoire.


      Louise

  Il aime tant le roi !

      Sa Mère

        C’est qu’il l’a déjà vu.

      Louise

  Et moi, je vais le voir ! Toujours je l’ai prévu,
  Oui, c’est un bien grand roi !

      Sa Mère

          Le plus grand de la terre.
  Splendide dans la paix...

      Louise

        Incroyable mystère !
  Tous mes rêves d’enfant ont été pleins de lui,
  Ma mère, et de le voir je n’ai peur qu’aujourd’hui.
  J’ai toujours deviné ses yeux et son sourire,
  Son front, où la nature avait écrit : Empire !
  Oui, j’ai toujours rêvé que le roi me parlait,
  Et que sa grande voix de bien loin m’appelait :
  N’est-ce pas étonnant, ma mère !...
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