« LXI. Le Petit Rieur », Marceline Desbordes-Valmore. Les Pleurs. Poésies nouvelles, Paris : Charpentier, 1833
« Le petit Rieur », Marceline Desbordes-Valmore. Les Pleurs. Poésies nouvelles, Paris : Madame Goullet, 1834
Éditions du poème dans des volumes de l’œuvre poétique de Desbordes-Valmore :
« Le petit Rieur », Marceline Desbordes-Valmore. Œuvres poétiques de Marceline Desbordes-Valmore. 1819-1859. Les Enfants et les Mères, Paris : Lemerre, p. 58-62, 1887
« Le petit rieur », Marceline Desbordes-Valmore. Poésies complètes de Marceline Desbordes-Valmore publiées par Bertrand Guégan avec des notes et des variantes, tome second, Paris : Éditions du Trianon, p. 348-352, 1932
« Le petit rieur », Marc Bertrand. Les Œuvres poétiques de Marceline Desbordes-Valmore, tome 1, Grenoble : Presses universitaires de Grenoble, p. 247, 1973
Éditions du poème dans des anthologies de poèmes de Desbordes-Valmore :
« Le petit Rieur », Mme Desbordes-Valmore. Contes en vers pour les enfants, Lyon : L. Boitel, p. 133-138, 1840
« Le petit rieur, vers », Mme Desbordes-Valmore. Le Livre des mères et des enfants, tome II, Lyon : L. Boitel, p. 65-70, 1840
« Le petit Rieur », Marceline Desbordes-Valmore. Poésies de madame Desbordes-Valmore, avec une notice par M. Sainte-Beuve, Paris : Charpentier, p. 356-359, 1842
« Le petit Rieur », Marceline Desbordes-Valmore. Poésies de Madame Desbordes-Valmore. Nouvelle édition augmentée et précédée d’une notice par M. Sainte-Beuve, Paris : Charpentier, p. 298-301, 1860
« Le Petit Rieur », Marceline Desbordes-Valmore. Les Poésies de l’enfance, par Mme Desbordes-Valmore, Paris : Garnier Frères, p. 12-16, 1869
« Le Petit Rieur », Marceline Desbordes-Valmore. Les Poésies de l’enfance, par Mme Desbordes-Valmore, Deuxième édition. Revue et augmentée. Paris : Garnier Frères, p. 12-16, 1873
« Le Petit Rieur », Marceline Desbordes-Valmore. Les Poésies de l’enfance, par Mme Desbordes-Valmore, Troisième édition. Revue et augmentée. Paris : Garnier Frères, p. 12-16, 1876
« Le Petit Rieur », Marceline Desbordes-Valmore. Les Poésies de l’enfance, par Mme Desbordes-Valmore, Quatrième édition. Paris : Garnier Frères, p. 12-16, 1881
Texte du poème (selon l’édition de Marc Bertrand de 1973) :
LE PETIT RIEUR
Vous avez appris qu’il a été dit : Œil pour
œil, dent pour dent.
Bienheureux ceux qui pleurent parce qu’ils
seront consolés !
Évangile.
"Laissez entrer ce chien qui soupire à la porte ;
Je souffre quand j’entends souffrir autour de moi :
Fût-il aveugle et vieux, il pleure, qu’on l’apporte,
Mon feu lui sera doux... Quoi ! petit Paul, c’est toi ?"
C’était le petit Paul. Sous un brouillard d’automne,
Pensif et tout mouillé depuis un long moment,
Sans l’ouvrir, à la porte il grattait doucement.
Pourquoi n’entrait-il pas ? On l’entoure, on s’étonne.
Il entre. Il reste là sans avoir dit : bonsoir,
Bonsoir, petite mère ! et sans oser s’asseoir.
Mais Paul tenait en vain sa paupière baissée ;
Les mères ont des yeux qui percent la pensée.
"De l’école avant l’heure on vous a fait sortir ;
Pourquoi? Ne mentez pas.
- - Je ne sais plus mentir,
Mère ! Pour presque rien.
- - Presque dit quelque chose :
Votre maître est si bon qu’il ne fait rien sans cause.
- On ne peut jamais rire, et c’est bien malheureux !
Moi, quand je ne ris pas, je suis tout las de vivre.
- Vous avez donc ri, Paul ?
- Oui, mère, sous mon livre.
- Qui vous rendait si gai ?
- Christophe. Il est affreux,
Christophe ! Il a l’œil trouble et la tête enfoncée.
Ses bras vont jusqu’à terre, et sa jambe est torsée,
Comme cela !
- C’est triste.
- Oui, si je l’avais su :
Mais je n’avais jamais vu d’écolier bossu ;
J’ai cru que les bossus venaient tout vieux au monde,
Comme Esope à mon livre.
- Esope fut enfant,
Et sa mère pleura. Pitié douce et profonde,
La laideur s’embellit quand ta voix la défend.
L’homme apporte des maux dont rien ne le console !
- Mais Christophe, ma mère, est un rude garçon ;
Ce n’est qu’un paysan, le dernier de l’école.
Et comme on riait trop pour suivre la leçon,
J’ai dit : Esope ! Esope ! en regardant Christophe ;
Et j’ai fait le portrait du crochu philosophe :
Voyez ! messieurs, voyez le divin animal !
- Et que disait Christophe ?
- Il détournait la vue ;
Il cachait dans ses mains sa rougeur imprévue,
Et je crois qu’il pleurait.
- Tais-toi ! tu me fais mal.
Il pleurait !... Ô railleurs, que vous êtes à craindre !
Un être a donc souffert, et souffert sans se plaindre :
Tout ce qui pleure est beau. Je l’aime en ce moment ;
Oui, j’aime mieux Christophe et sa jambe tournée,
Que ta langue épineuse à blesser destinée ;
Je l’embrasse de l’âme et je le vois charmant.
Viens, que je te corrige. Écoute-moi : tu m’aimes ?
- Oh oui !
- Souvent nos dards retombent sur nous-mêmes.
Regarde-moi longtemps : et que ton avenir
S’épure d’un amer et tendre souvenir ;
Comment me trouves-tu ?
- Belle comme une mère !
Ô ma mère ! vos traits ont la douceur du ciel.
La Vierge des enfants, que l’on prie à Noël,
Est comme vous tendre et sévère ;
Oui, vous lui ressemblez. J’y pense en vous voyant,
Et c’est vous que je vois, ma mère, en la priant !
À l’église une fois vous êtes apparue,
Et la foule indigente en joie est accourue ;
Vos habits étaient gais ; vous étiez blanche ; et moi
Je disais : C’est ma mère ! et l’on disait : "Hé ! quoi !
C’est sa mère !" Ah ! maman ! quel bonheur !
- Je t’écoute,
Et je plains ton doux rêve ; il me touche. Il m’en coûte
D’attrister le miroir attaché sur ton cœur,
Où tu me trouves belle, où je me vois aimée ;
Mais, regarde, et gémis d’être un enfant moqueur :
Je suis laide.
- Ma mère !...
- Enfant ! Je vous afflige ?
Je vous ôte un bandeau. Je suis laide, vous dis-je ;
Un jour, mon petit Paul aussi rira de moi.
- Je le tuerai, ma mère ! oh ! quand il serait roi.
Dieu ! rire de ma mère !
- Et l’enfant qu’elle adore,
L’enfant que son malheur lui rend plus sien encore,
Penses-tu qu’une mère, au fond de ses douleurs,
Ne se lèvera pas pour revenger ses pleurs ?
Et toi, mon fol enfant, fier de tes belles armes,
Lançant ton rire ingrat sur l’objet de ses larmes,
Prends garde ! si ta langue allait faire mourir !
Dieu dit : "Tu souffriras ce que tu fais souffrir."
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