« Rencontre d’une chèvre et d’une brebis », Marceline Desbordes-Valmore. Poésies inédites de Madame Desbordes-Valmore publiées par M. Gustave Revilliod, Genève : Jules Fick, p. 201-203, 1860
« Rencontre d’une chèvre et d’une brebis », Marceline Desbordes-Valmore. Poésies de Mme Desbordes-Valmore publiées par Gustave Revilliod (deuxième édition), Genève : Jules-Guillaume Fick, p. 223-225, 1873
Prépublications :
« Rencontre d’une chèvre et d’une brebis », Musée des familles : lectures du soir. Mundo pintoresco y literario. Museo de las familias, volume 18, livraison 45, Paris, p. 359, 1851-09
« Rencontre d’une chèvre et d’une brebis », Musée des familles : lectures du soir. Mundo pintoresco y literario. Museo de las familias, tomo secundo, 45, p. 359, 1851-09
Édition du poème dans des volumes de l’œuvre poétique de Desbordes-Valmore :
« Rencontre d’une chèvre et d’une brebis », Marc Bertrand. Les Œuvres poétiques de Marceline Desbordes-Valmore, tome 2, Grenoble : Presses universitaires de Grenoble, p. 562, 1973
Texte du poème (selon l’édition de Marc Bertrand de 1973) :
RENCONTRE D’UNE CHÈVRE ET D’UNE BREBIS
"Pardon ! n’est-ce pas vous que j’ai vue une fois ?"
Dit, en faisant la révérence,
La chèvre à la brebis de chétive apparence,
Liée et seule au bord d’un bois.
"Vous étiez, si c’est vous, si charmante et si folle
Qu’en vous voyant ainsi je n’osais vous parler.
J’accusais ma mémoire, et j’allais m’en aller
Sans vous adresser la parole."
Et la brebis, levant la tête avec effort,
Bêle ce sanglot de son âme :
- "Vous ne vous trompez pas ; c’est... c’était moi, madame ;
Et me voilà ! ... voilà mon sort.
"Quand j’étais blanche et rose, on m’a beaucoup parée.
Aux fêtes du printemps on m habillait de fleurs ;
On me laissait brouter sur de tendres couleurs,
Et je me croyais adorée.
"L’eau filtrant du rocher pour laver ma toison
Ne semblait jamais assez claire ;
Oh ! madame, c’est doux ! oui, c’est si doux de plaire
Qu’on n’en cherche pas la raison.
"Je dansais à la flûte une couronne en tête ;
J’en faisais mon devoir et ma cour au pasteur.
Je buvais dans sa tasse, intrépide, sans peur,
Et ses festins étaient ma fête.
"Tout changea, Le pasteur, las de m’être indulgent,
Me fit traîner au sacrifice.
Toutefois un enfant me sauva du supplice
Alors qu’on allait m’égorgeant.
"La pitié ! ... Je le crois, mais on m’ôta ma laine,
Ma sonnette d’argent, mes flots de rubans verts,
Ma liberté, ma part dans ce bel univers,
Et le doux lait dont j’étais pleine.
"Je fus liée..." - "Horreur ! Ah ! j’aurais tant mordu,
Tant bondi pour casser ma corde,
Tant bramé vers le ciel : "A moi ! Miséricorde !"
Que mon droit m’eût été rendu.
"Aux cris de l’innocence il faut que Dieu réponde !
Oui, madame, on m’égorge ; il doit me secourir.
Il doit me délier, moi, faite pour courir
Toutes les montagnes du monde !"
Le nez de la brebis se baissa consterné.
Humble aux honneurs, douce au martyre,
Son cœur saigne et pourtant sa plainte se retire
De la chèvre au front étonné.
- "Quoi vous ne sautez pas contre un sort si funeste ?
Que votre haine est molle et lente à s’enflammer !"
- "La haine corromprait le bonheur qui me reste."
- "Hé, mon Dieu ! Quel est donc votre bonheur ?"
- "D’aimer".
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