Gioachino Rossini, « Le Saule pleureur », Paris : La librairie musicale, 1840.
Texte du poème (selon l’édition de Marc Bertrand de 1973) :
LE SAULE
Saule de Sainte-Hélène,
Comme un gardien pensif,
Quand Dieu brise la chaîné
De l’immortel captif,
Pourquoi, tendre verdure,
Ce long murmure
Plaintif !
Ambassadeurs du monde,
Armés des trois couleurs,
Quand vingt vaisseaux sur l’onde
L’emportent dans les fleurs,
Pourquoi tes branches vertes,
Toutes couvertes
De pleurs ?
Oh ! laisse-lui mes larmes,
Pauvre peuple ébloui ;
Crois-tu donc sous ses armes
Qu’il renaisse aujourd’hui ?
Va ! la mort n’a qu’une heure,
Et je la pleure
Sur lui !
Quand le grand capitaine
Se coucha sans retour
Au flanc de Sainte-Hélène,
Ma feuille prit le jour :
Depuis, je l’environne
D’une couronne
D’amour.
J’entourai sa grande ombre
De liens innocents ;
Il dormit calme et sombre
Dans mes bras frémissants ;
Et pour lui, mon haleine
Fut pure, et pleine
D’encens !
Car de pitiés divines
La vierge pleura tant,
Qu’elle enfla mes racines
Sous le roc palpitant ;
Et du bruit de ma sève
Rendit son rêve
Content !
Pour apaiser son âme,
Qui soupirait souvent,
J’imitai d’une femme
Le Requiem fervent ;
Et sur l’étroite pierre
Une prière
D’enfant !
Quand la mer animée,
Dans ses flots turbulents
Simulait son armée
Et les tambours roulants,
J’inondais sa mémoire
De bruits de gloire
Plus lents.
Du martyr d’Angleterre
Honorant le tombeau,
Sur ce Christ militaire
J’inclinai mon drapeau :
Et vingt ans son étoile
Ourdit mon voile,
Plus beau !
Linceul d’amour encore,
Je demande à couvrir
Sa cendre que j’adore,
Qu’il voulait vous offrir ;
Je veux, comme lui-même,
Pour ce que j’aime,
Mourir !
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