Poème « Une prière à Rome »

Premier vers dans l’édition de Marc Bertrand : « Rome, où ses jeunes pas ont erré, belle Rome !… »


Manuscrits du poème :

Éditions du poème :

Édition du poème dans des recueils :

  • « Une Prière à Rome », Marceline Desbordes-Valmore. Bouquets et prières, Paris : Dumont, p. 141-145, 1843

Éditions du poème dans des volumes de l’œuvre poétique de Desbordes-Valmore :

  • « Prière à Rome », Boyer d’Agen. Œuvres manuscrites de Marceline Desbordes-Valmore : albums à Pauline, Paris : A. Lemerre, p. 145-147, 1921
  • « Une Prière à Rome », Marceline Desbordes-Valmore. Œuvres poétiques de Marceline Desbordes-Valmore. Reliquiæ. Volume 4, Paris : A. Lemerre, p. 182-184, 1922
  • « Une prière à Rome », Marc Bertrand. Les Œuvres poétiques de Marceline Desbordes-Valmore, tome 2, Grenoble : Presses universitaires de Grenoble, p. 472, 1973

Édition du poème dans des anthologies de poèmes de Desbordes-Valmore :

  • « Une prière à Rome », Marceline Desbordes-Valmore. Poésies de Marceline Desbordes-Valmore, Lyon : H. Lardanchet, p. 213-215, 1927





Texte du poème (selon l’édition de Marc Bertrand de 1973) :

UNE PRIÈRE A ROME

Pour mon Frère

  Rome, où ses jeunes pas ont erré, belle Rome !
  Je ne demande pas tes antiques malheurs,
  Tes siècles admirés, tes sanglantes douleurs ;
  Ta grande ombre est couchée, elle rêve un grand homme :
  C’est le trésor du temps, le temps l’enfantera ;
  Tes flancs seront rouverts et ton deuil sourira.
  Dors au bruit des tombeaux dont la poudre frissonne ;
  Ils se réveilleront. Je n’éveille personne,
  Moi ; je suis la prière inclinée à genoux,
  Disant à la Madone : Ayez pitié de nous !
  Je suis l’aile d’oiseau qui traverse la terre,
  Et qu’arrête en passant ta splendeur solitaire ;
  Je suis le grain de sable à tout vent emporté,
  Sollicitant aussi sa part d’éternité.

  Tout veut vivre. Altéré de longs bruits, de longs rêves,
  Tout veut planter sa fleur sur d’immuables grèves ;
  Tout veut nouer ses jours à d’innombrables jours,
  Et crier en fuyant : Toujours ! toujours ! toujours !
  Le vieil aveugle aussi qui chante à la guitare,
  Dont le souffle s’épuise et dont la voix s’égare,
  Sent-il qu’un cercueil passe en son chemin obscur ?
  Aveugle et vieux, il fuit en repoussant le mur.
  Sa bouche était ouverte à chanter Métastase ;
  Le soleil et la brise enlevaient son extase ;
  De longs jours ruisselaient au fond de son cachot ;
  L’espoir battait de l’aile à son front nu, mais chaud ;
  Un mort vient tout à coup de souffler sa lumière ;
  C’est une double nuit qui pèse à sa paupière.
  Il ne veut pas qu’on meure ! et je ne le veux pas ;
  Et j’aime mieux l’exil que la mort dans mes pas.

  Sur la mer sans repos qui parle avec l’orage,
  Dans les bois dont la sève a déroulé l’ombrage

*Le montagne de la Croix-Rousse, à Lyon.


  Aux rayons du soleil âpre et brûlant mes mains,
  Qui du même baiser consume les humains,
  Je n’ai jamais voulu mourir à mes misères,
  Ni m’éteindre à l’espoir qui court dans mes prières ;
  Moi, le plus faible son de l’éternel accord,
  Rome, je ne veux pas, vois-tu, me taire encor.

  Je cherche à quelle pierre une main adorée
  Grava l’humble présent de ma lettre ignorée,
  Quand de la grande armée alors soldat vainqueur,
  Mon frère à tes trésors n’enleva qu’une fleur.
  Rome ! elle était pour moi, je l’avais souhaitée ;
  Et toute tiède encor je te l’ai rapportée,
  À toi qui peux me dire où, captif et sanglant,
  Mon soldat traîne aussi son sort las et brûlant :
  Dans quel cachot d’Espagne, à quel ponton d’Écosse
  On l’envoya chercher une tombe précoce ;
  Et si par tout ce monde où Dieu me fait errer,
  Je reste pour l’attendre, ou bien pour le pleurer !

  C’est pour lui que j’étreins ta grande croix latine ;
  Que je regarde en haut la coupole Sixtine,
  Avec le saint effroi qui saisit un lépreux,
  S’il a vu trop d’éclat dans son sort ténébreux :
  Car je n’ai pas compris ce qu’il faut bien comprendre.
  Trop seule pour rester, trop lasse pour apprendre,
  Ton passé me tuerait par ses grandes rumeurs ;
  Mais je demande à vivre enfin, car je me meurs.

  Rome ! je veux l’amour avec toutes ses larmes,
  Avec son innocence, avec ses saintes armes ;
  C’est bien plus que toi, Rome, où je passe à genoux,
  Disant à la Madone : Ayez pitié de nous !
  C’est bien plus pour l’oiseau qui traverse la terre,
  Suspendu, sans chanter sur ta croix solitaire,
  Et pour le grain de sable à tout vent emporté,
  Sollicitant aussi sa part d’éternité !





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