« Une ruelle de Flandre », Marceline Desbordes-Valmore. Poésies inédites de Madame Desbordes-Valmore publiées par M. Gustave Revilliod, Genève : Jules Fick, p. 69-73, 1860
« Une ruelle de Flandre », Marceline Desbordes-Valmore. Poésies de Mme Desbordes-Valmore publiées par Gustave Revilliod (deuxième édition), Genève : Jules-Guillaume Fick, p. 79-83, 1873
Prépublication :
« Une ruelle en Flandre », Revue du Nord de la France : recueil religieux, philosophique et littéraire, p. 50-52, 1856
Éditions du poème dans des volumes de l’œuvre poétique de Desbordes-Valmore :
« Une ruelle de Flandre », Marceline Desbordes-Valmore. Œuvres poétiques de Marceline Desbordes-Valmore. 1833-1859. Élégies. Romances. Mélanges. Fragments. Poésies posthumes, Paris : Lemerre, p. 318-321, 1886
« Une ruelle de Flandre », Marc Bertrand. Les Œuvres poétiques de Marceline Desbordes-Valmore, tome 2, Grenoble : Presses universitaires de Grenoble, p. 524, 1973
Éditions du poème dans des anthologies de poèmes de Desbordes-Valmore :
« Une ruelle de Flandre », Marceline Desbordes-Valmore. Les Poésies de l’enfance, par Mme Desbordes-Valmore, Paris : Garnier Frères, p. 202-207, 1869
« Une Ruelle de Flandre », Marceline Desbordes-Valmore. Les Poésies de l’enfance, par Mme Desbordes-Valmore, Deuxième édition. Revue et augmentée. Paris : Garnier Frères, p. 210-214, 1873
« Une Ruelle de Flandre », Marceline Desbordes-Valmore. Les Poésies de l’enfance, par Mme Desbordes-Valmore, Troisième édition. Revue et augmentée. Paris : Garnier Frères, p. 210-214, 1876
« Une Ruelle de Flandre », Marceline Desbordes-Valmore. Les Poésies de l’enfance, par Mme Desbordes-Valmore, Quatrième édition. Paris : Garnier Frères, p. 210-214, 1881
« Une ruelle de Flandre », Marceline Desbordes-Valmore. Œuvres choisies de Marceline Desbordes-Valmore avec études et notices par Frédéric Loliée, Paris : Libairie Ch. Delagrave, p. 174-176, 1909
« Une Ruelle de Flandre », Marceline Desbordes-Valmore. L’amour, l’amitié, les enfants, mélanges. Choix, notices biographique et bibliographique par Alphonse Séché, Paris : Louis-Michaud, p. 116-119, 1910
« Une ruelle de Flandre », Marceline Desbordes-Valmore. Poésies. Choix et notice par Oscar Colson. Bibliothèque francaise, Vol. LVI, Berlin : Internationale Bibliothek, p. 193-195, 1923
« Une ruelle de Flandre », Marceline Desbordes-Valmore. Poésies de Marceline Desbordes-Valmore, Lyon : H. Lardanchet, p. 229-232, 1927
« Une Ruelle de Flandre », Marceline Desbordes-Valmore. Poèmes et proses [Préface et notes de Tony Taveau], Paris : Marcel Seheur, p. 23-26, 1928
« Une ruelle de Flandre », Marceline Desbordes-Valmore. Choix de poésies. Préface par André Dumas. Bibliothèque-Charpentier, Paris : Fasquelle, p. 80-83, 1933
« Une ruelle de Flandre », Marceline Desbordes-Valmore. Choix de poésies. Illustrations de G. Ducultit, Chamonix : Jean Landru, p. 35-40, 1944
« Une Ruelle de Flandre », Marceline Desbordes-Valmore. Poésies. Préface et choix d’Yves Bonnefoy, Paris : Gallimard nrf, p. 200-203, 1983
Texte du poème (selon l’édition de Marc Bertrand de 1973) :
UNE RUELLE DE FLANDRE
A Madame Desloges, née Leurs
Dans l’enclos d’un jardin gardé par l’innocence
J’ai vu naître vos fleurs avant votre naissance.
Beau jardin, si rempli d’œillets et de lilas
Que de le regarder on n’était jamais las.
En me haussant au mur dans les bras de mon frère,
Que de fois j’ai passé mes bras par la barrière
Pour atteindre un rameau de ces calmes séjours
Qui souple s’avançait et s’enfuyait toujours !
Que de fois, suspendus aux frêles palissades,
Nous avons savouré leurs molles embrassades,
Quand nous allions chercher pour le repos du soir
Notre lait à la cense, et longtemps nous asseoir
Sous ces rideaux mouvants qui bordaient la ruelle !
Hélas ! qu’aux plaisirs purs la mémoire est fidèle !
Errant dans les parfums de tous ces arbres verts,
Plongeant nos fronts hardis sous leurs flancs entr’ouverts,
Nous faisions les doux yeux aux roses embaumées
Qui nous le rendaient bien, contentes d’être aimées !
Nos longs chuchotements entendus sans nous voir,
Nos rires étouffés pleins d’audace et d’espoir
Attirèrent un jour le père de famille
Dont l’aspect, tout d’un coup, surmonta la charmille,
Tandis qu’un tronc noueux me barrant le chemin
M’arrêta par la manche et fit saigner ma main.
Votre père eut pitié... C’était bien votre père !
On l’eût pris pour un roi dans la saison prospère.
Et nous ne partions pas à sa voix sans courroux :
Il nous chassait en vain, l’accent était si doux !
En écoutant souffler nos rapides haleines,
En voyant nos yeux clairs comme l’eau des fontaines,
Il nous jeta des fleurs pour hâter notre essor,
Et nous d’oser crier : "Nous reviendrons encor !"
Quand on lavait du seuil la pierre large et lisse
Où dans nos jeux flamands l’osselet roule et glisse,
En rond, silencieux, penchés sur leurs genoux,
D’autres enfants jouaient enhardis comme nous ;
Puis, poussant à la fois leurs grands cris de cigales,
Ils jetaient pour adieux des clameurs sans égales,
Si bien qu’apparaissant tout rouges de courroux
De vieux fâchés criaient : "Serpents ! vous tairez-vous !"
Quelle peur ! ... Jamais plus n’irai-je à cette porte
Où je ne sais quel vent par force me remporte !
Quoi donc ! quoi ! jamais plus ne voudra-t-il de moi
Ce pays qui m’appelle et qui s’enfuit ?... Pourquoi ?
Alors les blonds essaims de jeunes Albertines,
Qui hantent dans l’été nos fermes citadines,
Venaient tourner leur danse et cadencer leurs pas
Devant le beau jardin qui ne se fermait pas.
C’était la seule porte incessamment ouverte,
Inondant le pavé d’ombre ou de clarté verte,
Selon que du soleil les rayons ruisselants
Passaient ou s’arrêtaient aux feuillages tremblants.
On eût dit qu’invisible une indulgente fée
Dilatait d’un soupir la ruelle étouffée,
Quand les autres jardins enfermés de hauts murs
Gardaient sous les verrous leur ombre et leurs fruits mûrs.
Tant pis pour le passant ! A moins qu’en cette allée,
Élevant vers le ciel sa tête échevelée,
Quelque arbre, de l’enclos habitant curieux,
Ne franchit son rempart d’un front libre et joyeux.
On ne saura jamais les milliers d’hirondelles
Revenant sous nos toits chercher à tire-d’ailes
Les coins, les nids, les fleurs et le feu de l’été,
Apportant en échange un goût de liberté.
Entendra qui pourra sans songer aux voyages
Ce qui faisait frémir nos ailes sans plumages,
Ces fanfares dans l’air, ces rendez-vous épars
Qui s’appelaient au loin : "Venez-vous ? Moi, je pars !"
C’est là que votre vie ayant été semée
Vous alliez apparaître et charmante et charmée ;
C’est là que préparée à d’innocents liens
J’accourais... Regardez comme je m’en souviens !
Et les petits voisins amoureux d’ombre fraîche
N’eurent pas sitôt vu, comme au fond d’une crèche,
Un enfant rose et nu plus beau qu’un autre enfant,
Qu’ils se dirent entre eux : "Est-ce un Jésus vivant ?"
C’était vous ! D’aucuns nœuds vos mains n’étaient liées ;
Vos petits pieds dormaient sur les branches pliées ;
Toute libre dans l’air où coulait le soleil
Un rameau sous le ciel berçait votre sommeil ;
Puis, le soir, on voyait d’une femme étoilée
L’abondante mamelle à vos lèvres collée,
Et partout se lisait dans ce tableau charmant
De vos jours couronnés le doux pressentiment.
De parfums, d’air sonore incessamment baisée,
Comment n’auriez-vous pas été poétisée ?
Que l’on s’étonne donc de votre amour des fleurs !
Vos moindres souvenirs nagent dans leurs couleurs.
Vous en viviez, c’étaient vos rimes et vos proses :
Nul enfant n’a jamais marché sur tant de roses !
Mon Dieu ! s’il n’en doit plus poindre au bord de mes jours
Que sur ma sœur de Flandre il en pleuve toujours !
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